De nombreuses questions nous ont été remontées sur la présentation du bulletin de paie avec l’entrée en vigueur des avenants révisant les systèmes de classification et de rémunération. Cet article a pour objectif de vous indiquer les implications en paie des mesures prévues par les avenants. Nous rappelons par la même occasion qu’il n’est pas possible pour un éditeur de logiciels de paie de proposer une facturation supplémentaire afin d’appliquer correctement une évolution conventionnelle.
Pour rappel, les deux avenants n°10-22 et 1 à l’avenant n°10-22 ont été étendus par un arrêté d’extension du 11 décembre 2023 publié au Journal Officiel du 16 décembre dernier.
Aussi, au 1er janvier 2024, toutes les structures appartenant à la branche professionnelle Alisfa qu’elles soient ou non adhérentes au syndicat Elisfa doivent appliquer les nouveaux systèmes de classification et de rémunération.
Avec l’entrée en vigueur des avenants, de nouvelles règles s’appliquent et impactent la structuration de la paie entrainant une nouvelle présentation des bulletins de paie.
Les articles 1.1.1 et 1.1.2 du chapitre V « système de rémunération » prévoient respectivement :
- « Le salaire socle conventionnel est exprimé en euros. Il correspond, au moment du classement dans l’emploi, aux postes positionnés au premier niveau de chaque critère.
Il est calculé sur la base d’un équivalent temps plein.
Il est annuel et exprimé en euros. Il est payé mensuellement par douzième ».
- « Le salaire additionnel est égal au produit de la valeur du point par la pesée résultant du positionnement dans l’emploi dans la grille de cotation.
Il est calculé sur la base d’un équivalent temps plein.
Il est annuel et exprimé en euros. Il est payé mensuellement par douzième ».
=> Cela implique que le salaire socle conventionnel fixé au 1er janvier 2024 à 22.100 euros annuels bruts et le salaire additionnel calculé en multipliant le nombre de points par 55 euros doivent être proratisés selon le temps de travail du salarié.
Conseil d’Elisfa : à minima il est possible de prévoir une seule ligne sur le bulletin de paie regroupant le salaire socle conventionnel et le salaire additionnel. Toutefois, nous préconisons dans un souci de pédagogie et de compréhension pour le salarié, de distinguer sur deux lignes différentes le salaire socle conventionnel et le salaire additionnel.
Les articles 1.2.1 et 1.2.2 dudit chapitre prévoient quant à eux :
- « L’ancienneté au sein de la branche professionnelle Alisfa est valorisée par l’acquisition de point tous les ans, à la date anniversaire d’embauche du salarié.
L’acquisition de point est proratisée en fonction du temps de travail du salarié comme suit :- Temps de travail du salarié inférieur à 0.23 équivalent temps plein (ETP) : acquisition de 25% du point à la date anniversaire d’embauche du salarié ;
- Temps de travail du salarié égal ou supérieur à 0.23 équivalent temps plein (ETP) et inférieur à 0.50 ETP : acquisition de 50% du point à la date anniversaire de l’embauche du salarié ;
- Temps de travail du salarié égal ou supérieur à 0.50 ETP : acquisition du point à la date anniversaire d’embauche du salarié ».
- « Afin de valoriser l’acquisition de compétences dans l’emploi repère, les partenaires sociaux ont défini 4 paliers. Chaque palier ouvre droit à un nombre de points défini à l’article 1.2.2.2 du présent chapitre.
Le nombre de points étant proratisé pour les salariés dont le temps de travail est inférieur à un mi-temps, l’employeur devra donc calculer la moyenne du temps de travail du salarié sur cette période de 24 mois de travail effectif ou assimilé ».
Il est à noter que les seuils mis en place pour l’acquisition de compétences sont les mêmes que pour l’ancienneté de branche.
=> Ces dispositions impliquent que l’ancienneté de branche et l’acquisition de compétences (l’expérience professionnelle) ne doivent pas être proratisées en fonction du temps de travail du salarié puisque des seuils d’attribution de points sont mis en place. Aussi, le bulletin de paie ne doit pas regrouper le salaire socle conventionnel, le salaire additionnel et ces deux éléments de rémunération dans une seule et même ligne car cela aura pour effet de proratiser en fonction du temps de travail l’expérience professionnelle, ce qui est interdit.
Cela conduirait l’employeur à ne pas respecter les dispositions de la convention collective et l’exposerait à un risque juridique (rappel de salaire) en raison d’une mauvaise application des dispositions conventionnelles par l’éditeur de paie.
Conseil d’Elisfa : à minima il est possible de prévoir une nouvelle ligne regroupant l’expérience professionnelle (l’ancienneté de branche et l’acquisition de compétences). Elisfa préconise, ici encore, de réaliser deux lignes sur le bulletin de paie afin de pouvoir identifier l’ancienneté de branche.
En effet, l’article 1.2.1 prévoit « Les points acquis au titre de cette ancienneté doivent être repris dans leur intégralité en cas de changement d’entreprise par un salarié, dès lors que l’entreprise précédente appliquait la convention collective nationale des Acteurs du Lien Social et Familial […] Pour bénéficier de cette reprise, le salarié doit présenter, dans un délai maximum d’un mois suivant son embauche, le dernier bulletin de paie permettant de justifier du nombre de points acquis au titre de cette ancienneté de branche ».
Aussi, faire apparaitre sur une ligne distincte le nombre de points acquis au titre de l‘ancienneté de branche permettra aux prochains employeurs de connaitre le nombre de points à reprendre. Si jamais une seule ligne est réalisée, nous vous conseillons, d’indiquer en haut du bulletin ou en bas dans les commentaires, le nombre de points acquis par le salarié au titre de l’ancienneté de branche.
En résumé : le bulletin de paie devra présenter au minimum deux lignes distinctes à savoir :
- Une ligne correspondant à la rémunération de base (salaire socle conventionnel + salaire additionnel)
- Une ligne correspondant à l’expérience professionnelle (ancienneté de branche + acquisition de compétences).
Dans ce cas, il faut prévoir un renseignement particulier permettant d’identifier le nombre de points acquis au titre de l’ancienneté de branche.
La recommandation Elisfa pour la présentation du bulletin de paie est la suivante :
- Une ligne pour le salaire socle conventionnel,
- Une ligne pour le salaire additionnel,
- Une ligne pour l’ancienneté acquise au sein de la branche professionnelle,
- Une ligne pour l’acquisition de compétences.
Exemple illustré

1/ Les deux lignes du bulletin de salaire correspondant à la rémunération de base : salaire socle conventionnel + salaire additionnel ont comme base : le nombre d’heures réalisées et payées dans le mois ; le montant de la rémunération brute correspondant à cette partie du salaire est donc fonction du temps de travail.
Le taux retenu pour le salaire socle conventionnel est le taux horaire du salaire socle conventionnel soit : 22 100 / 12 / 151.67 = 12,1426 €
Le taux retenu pour le salaire additionnel est le taux horaire du salaire additionnel correspondant à 235 points soit : 235 * 55 / 12 / 151,67 = 7,1015 €
2/ Les deux lignes du bulletin de salaire correspondant à l’expérience professionnelle : ancienneté branche + acquisition de compétences dans l’emploi repère ont comme base : le nombre de points acquis par la salariée le mois d’établissement de la paie ; le montant de la rémunération brute correspondant à cette partie du salaire ne varie donc pas en fonction du temps de travail.
Le taux retenu pour les deux éléments de l’expérience professionnelle est la valeur mensuelle du point soit : 55 / 12 = 4,5833 €
3/ L’ancienneté est obligatoirement mentionnée sur un bulletin de salaire. Elle correspond au nombre d’années et mois écoulés depuis la date d’embauche du salarié.
Cette ancienneté ne correspond pas toujours avec l’ancienneté acquise au sein de la branche professionnelle. Dans le présent exemple, l’ancienneté acquise dans la branche Alisfa est en effet de 13 ans. C’est pourquoi, nous conseillons vivement de faire apparaitre cette ancienneté branche dans une ligne distincte du bulletin de salaire (voir article ci-avant).
Dans l’exemple, la crèche des Petits loups a appliqué la convention collective Alisfa lorsque celle-ci a été rendue obligatoire pour les établissements d’accueil de jeunes enfants associatifs (arrêté d’extension de l’avenant 6-08 relatif au champ d’application, du 16 sept. 2009 publié au JO du 23 sept. 2009). L’ancienneté acquise dans la branche Alisfa par Martine X dont la carrière s’est entièrement déroulée dans cette crèche est donc décomptée depuis le 3 mars 2011 (première date anniversaire d’embauche où la salariée a une année pleine dans la branche professionnelle. Au 3 mars 2010, elle n’avait en effet pas encore une année pleine dans la branche professionnelle. L’article 1.2.1.a précisant que le point s’acquière à la date anniversaire d’embauche, nous ne décomptons pas l’ancienneté à compter du 1er octobre 2009, date de mise en place de la convention Alisfa. Toutefois un tel décompte ou la comptabilisation d’un premier point au 3 mars 2010 sont des pratiques plus favorables que celle définie dans la convention collective. Il est donc tout à fait possible de procéder de la sorte sous réserve de bien respecter le principe d’égalité de traitement pour l’ensemble des salarié·es).
Le pôle juridique et relatons sociales reste à votre disposition pour plus d’informations.