Un salarié dont le contrat de travail est suspendu peut être déclaré inapte

Pour mémoire, l’inaptitude du salarié à son poste de travail ne peut être constatée que par le médecin du travail, soit dans le cadre de la visite médicale de reprise, soit à l’occasion de tout autre examen médical assuré par le médecin du travail1. Plus précisément, le constat de l’inaptitude peut s’effectuer après tout examen médical pratiqué par le médecin du travail au cours de l’exécution du contrat de travail2.

De plus, l’alinéa 2 de l’article R.4624-34 du Code du travail, précise que le salarié peut notamment solliciter une visite médicale lorsqu’il anticipe un risque d’inaptitude, afin d’engager une démarche de maintien en emploi et de bénéficier d’un accompagnement personnalisé.

Cependant, l’inaptitude constatée par le médecin du travail lors d’une visite médicale demandée par le salarié pendant son arrêt de travail est-elle valable ?

La Cour de cassation, a répondu par l’affirmatif dans une décision du 24 mai 20233.

Dans cette affaire, un salarié, placé en arrêt maladie le 2 novembre 2017, a sollicité un examen médical au terme duquel le médecin du travail l’a déclaré inapte à son poste de travail le 13 novembre 2017.

En conséquence, l’employeur a procédé au licenciement du salarié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le salarié a cependant contesté le bien-fondé de ce licenciement devant les juridictions. Il a fait valoir que le médecin du travail ne pouvait constater son inaptitude à l’issue d’une visite médicale qu’il avait lui-même sollicitée, pendant la période de suspension de son contrat de travail, en raison d’un arrêt de travail pour maladie.

Les demandes du salarié ont été rejetées par le Conseil de prud’hommes mais aussi par la Cour d’appel. Cette dernière a estimé que le licenciement était valide dans la mesure où l’examen demandé par le salarié pouvait constituer l’examen médical permettant au médecin du travail de constater son inaptitude, peu important que cet examen ait eu lieu pendant l’arrêt de travail du salarié.

La Cour de cassation a approuvé ce raisonnement et soutient ainsi que le médecin du travail peut constater l’inaptitude d’un salarié à son poste de travail à l’issue d’une visite médicale, demandée par celui-ci, y compris pendant la suspension de son contrat de travail en raison d’un arrêt de travail.

La suspension du contrat de travail n’a donc aucune incidence sur la possibilité, pour le médecin du travail, de rendre un avis d’inaptitude. A condition, toutefois, que les critères visés aux articles L.4624-4 et R. 4624-42 du Code du travail soient remplis (étude de poste et des conditions de travail par le médecin du travail, échange avec l’employeur, impossibilité d’adaptation ou d’aménagement du poste du salarié…).

Pour rappel, l’examen médical, auprès de la médecine du travail, peut également être à la demande de l’employeur. A notre sens, une inaptitude pourrait être valablement constatée dans ce cadre. Mais, le salarié pourrait refuser de se présenter à l’examen sans que cela ne constitue une faute puisque cet examen interviendrait pendant une période de suspension du contrat de travail.

Par ailleurs, dans cette affaire, la visite médicale demandée par le salarié n’a pas la nature juridique d’une visite de pré-reprise mais d’une visite à la demande du salarié.
La visite de pré-reprise peut aussi être demandée par le salarié pendant la suspension de son contrat de travail dès lors que l’arrêt de travail est supérieur à 30 jours4. Mais, une telle visite n’a pas vocation à juger de l’aptitude du salarié à son poste de travail. Elle permet uniquement d’anticiper et de préparer, dans les meilleures conditions, le retour du salarié au travail.

A toutes fins utiles, vous pouvez retrouver notre fiche pratique ainsi que nos modèles de lettres relatifs au licenciement pour inaptitude.

Le pôle juridique relations sociales reste à votre disposition pour toutes informations complémentaires.

__________________    

1 C. trav., art. L. 4624-4  ; R. 4624-42   
2 Cass. soc., 7 juill. 2016, n° 14-26.590  
3 Cass. soc., 24 mai 2023, n° 22-10.517 
4 C. trav., art. L. 4624-2-4 et R. 4624-29 
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